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lundi 5 mai 2008

Le salaire de l’exil

Ce samedi Le Parisien révélait une bien curieuse offre d’emploi proposée par L’ANPE. En fait, il s’agit de deux offres, deux postes à pourvoir en informatique respectivement numérotées 637398L et 637400L.
Comme vous pouvez le constater sur la capture écran que j’ai effectué, il s’agit de postes à pourvoir en Inde, à Pondichery. Le niveau demandé est Bac+2, le salaire est à négocier entre 10000 et 20000 roupies pour 40 heures de travail par semaine… Sauf qu’au court actuel, la roupie est cotée 0,0159 Euros. Ce qui nous donne un salaire compris entre 159 € et 318 €… Par mois !
Ces deux offres sont sur le serveur de l’ANPE depuis au moins le 23 avril et si elles sont encore en ligne, c’est qu’elles n’ont pas encore trouvées preneurs. Pour l’agence, rien de choquant dans ces offres puisque le salaire proposé est quatre à cinq fois supérieur au salaire moyen indien.
Selon le Journal du Dimanche, l'offre à Pondichéry émane d'une agence web fondée en 1997 à Jonzac en Charente-Maritime, développant des services internet et délocalisée à Pondichéry depuis 2007 sous le nom de
Hangar 17 ICT. Son dirigeant, Denis Delcroix, a déclaré: «Je suis dans mon droit, je suis une entreprise indienne, j'embauche aux conditions locales». «La globalisation du marché m'a amené à ce nouveau positionnement stratégique» afin de «continuer à apporter des solutions toujours plus innovantes, à des tarifs ultra-compétitifs», explique son site à l'adresse des clients, parmi lesquels des marques de cognac du groupe LVMH, collectivités, industriels... et l'ANPE elle-même.

Alors la question que je me pose est qui va bien vouloir accepter une telle offre ?
Bac+2, en informatique cela suppose un jeune de 20 ans sans expérience. Il fut un temps, ou l’expatriation pouvait être une expérience personnelle épanouissante, mais surtout rémunératrice. Quel jeune (ou moins jeune) va accepter d’aller vivre à Pondichery, ville enchanteresse s’il en est, pour gagner certes correctement se vie, mais sans rien avoir à se mettre de coté pour un éventuel retour ? C’est un exil définitif ?
De plus, l’annonce ne précise pas si le trajet est pris en charge par l’employeur, ou pas. Sans compter que vu les compétences requise, j’imagine très bien ce futur informaticien bosser pour des développeurs de spam, pop-up et autres merdes qui nous empoisonnent l’écran.
A noter que depuis ce matin le site de Hangar 17 n’est plus joignable pour cause de… Maintenance. C’est peut-être pour ça qu’ils ont besoin d’un informaticien ? Mais vu le salaire, je pense qu’ils vont devoir attendre longtemps.
Monsieur Delcroix, vous n’avez pas de figure.

Le 14 mai 2008. Le site de Hangar 17 est de nouveau disponible. De même, les annonces ont disparues du site de l’ANPE.fr. La question reste entière : Les offres ont-elles été pourvues ou bien l’ANPE les a retirées ?

17 commentaires:

Anonyme a dit…

Les joies de la délocalisation ! Cette annonce nous met le nez dedans : la même société doit employer aussi des indiens... payés cinquante fois moins cher qu'un français en France !
Et pour le coup ils n'hésitent plus à offir un salaire de misère à un français aussi. Vu les conditions d'emploi en France, ils peuvent (presque) se le permettre.
Nivellement par le bas :(

Ceci dit, si j'avais 30 ans de moins et cherchais un premier emploi, j'irais bien passer un ou deux ans à Pondichery, séjour payé, en vivant au milieu des indiens et pas en touriste...

Anonyme a dit…

C’est bien ça qui m’inquiète, il va bien se trouver quelques imbéciles à la courte vue pour accepter un tel emploi. Je ne dis pas ça pour toi, Fantôme, loin de moi de telles pensées. Mais dans le fléau que représente la mondialisation, accepter un tel deal, c’est pactiser avec le diable. Si ce monsieur a tant besoin d’un informaticien à ce pris, qu’il engage un indien, je suis sur qu’il fera un heureux… Que dis-je une famille d’heureux.

Anonyme a dit…

Je ne crois pas qu'il y ait beaucoup de candidats, en fait. Et bien sûr il vaudrait mieux que le poste soit proposé à un indien; mais il y a bien peu de chances que ce soit avec le même salaire ! C'est surtout ça qui me révolte; qu'on s'indigne peut-être davantage qu'une entreprise "ose" proposer ce salaire à un français que de constater qu'on pose comme un fait acquis (immuable ?) qu'un indien gagne 5 fois moins que ça. Bien sûr la vie revient moins cher là-bas, mais il n'en reste pas moins qu'à l'échelle mondiale c'est un revenu de misère qui interdit à ces salariés de choisir leur lieu de résidence, de vivre dans un pays "riche" s'ils le souhaitent... sachant que s'ils ont la chance d'y trouver un emploi à un salaire nettement supérieur à celui de l'Inde, ce sera quand même en étant exploités et sous-payés.

Anonyme a dit…

Excuse-moi, mais tu mélanges là… L’économie est ce qu’elle est, dans certains pays, le niveau de vie est tel qu’avec 100 €, tu vis comme un pape, c’est comme ça. On ne peut comparer que ce qui est comparable, aussi parlons plutôt de salaire moyen et de niveau de vie. 160 €/mois, pour un jeune indien, c’est comme si tu étais payé 5000 € au sortir de la fac ! C’est plutôt bien non ? Non, ce qui est malsain, c’est de venir proposer un tel salaire à un Français dans un climat tel que le notre et une économie comme la notre. De plus si le patron voulait « vraiment » jouer le jeu du développement il privilégierait l’emploi local. Un jour, peut-être, dans un monde à l’économie unifiée, de telles disparités n’existeront plus, mais ce n’est pas le cas aujourd’hui. D’ailleurs je pense que cela n’est pas souhaitable.

Anonyme a dit…

Je disais aussi "bien sûr la vie revient moins cher là-bas". Mais, comme tu le dis, ce qui peut se comparer c'est le niveau de vie; or biens de consommation, avantages sociaux, accès à l'éducation et aux loisirs (dont voyages, par exemple), etc. n'ont rien à voir en France et dans un pays comme l'Inde. Pour 160€/mois un jeune indien pourrait vivre "comme un pape" selon les critères indiens... qui ne sont pas les nôtres. Nous avons un peu trop tendance à faire l'impasse là-dessus (et de plus ces 160€ sont offerts à des français, pas à des indiens !).
Ce sont les produits de base qui sont moins chers dans les pays "pauvres", pas les produits de luxe (ou simplement de confort) qui sont accessibles à des revenus moyens en France. Et de plus les gros problèmes actuels (la faim) dûs à l'augmentation du prix des denrées alimentaires de base, dans beaucoup de pays à faible niveau de vie, vient accroître dramatiquement ces disparités.

Je trouve très choquant qu'un chef d'entreprise se permette de profiter de la situation pour proposer à des français un salaire ridicule selon nos standards, mais il ne pourrait pas le faire s'il n'existait pas de telles inégalités entre pays.

Dans un autre orde d'idée, je serais curieuse de savoir pourquoi tu ne penses pas souhaitable que "dans un monde à l'économie unifiée, de telles disparités (n'existent) plus" ? Je ne suis pas sûre de comprendre ta réponse, si ton raisonnement est basé sur des concepts économiques ;) mais j'aimerais quand même que tu développes un peu :)

PS : dis-moi si j'exagère avec mes "commentaires" à rallonge !

Anonyme a dit…

PS : histoire de voir ce que peuvent se payer un indien et un français, je viens de chercher le prix du vol aller-retour Paris-Calcutta (au pif : je n'ai pas trouvé Pondichéry ;) sur un site de vols dégriffés : 858€ par Jet Airways, 1015€ minimum par Air India.
Disons 800€. Ca représenterait un peu moins de la moitié de mon salaire (qui est disons moyen), donc faisable au prix d'économies. Pour un salaire moyen indien de 30 à 80€ (calculé d'après les chiffres donnés dans l'article) ça représenterait donc 10 à 25 mois de salaire ! Faisable ???
Avec un salaire moyen de chaque pays, un français peut donc se permettre un petit voyage en Inde, un indien ne peut pas se permettre un voyage en France...

Anonyme a dit…

Pourquoi je ne trouve pas souhaitable une économie unifiée à l’échelle mondiale ? Parce que dans mon esprit, cette unification ne peut se faire que dans la suppression des libertés, des particularités qui font de chaque personne ou groupe de personnes des entités uniques. Je me trompe peut-être, mais j’ai tendance à considérer le monde comme un ensemble d’écosystèmes interdépendants, un peu comme une forêt. Vouloir la régenter me semble illusoire et dangereux. Je n’ai pas fini ma série d’article sur la forêt, mais tu verras plus tard qu’il existe des gestions forestières respectueuses de l’environnement qui copient en fait ce que l’on trouve dans la nature. Une forêt dite « vierge » est un ensemble de petits systèmes forestiers mêlés en un patchwork anarchique. Mais si l’ensemble parait anarchique, ce que tu appelles toi-même « Un endroit broussailleux, varié et grouillant de vie », chaque pièce est en fait un système bien régulé.
Vouloir transformer nos économies en un vaste champ bien aligné me semble contre-nature en fait…
La métaphore sylvicole ne s’arrête pas là. On peut aussi voir dans l’unification des systèmes de production une volonté de l’ultralibéralisme, qui tend à vouloir rationnaliser les moyens humains et matériels dans un but productif. Moi, je préfère le patchwork. Même si l’inconvénient d’un patchwork économique, ce sont les inégalités « apparentes » entre les pièces, chaque pièce est en harmonie avec elle-même. Voilà pourquoi je ne trouve pas souhaitable que l’on regroupe tout le monde sous la même bannière.
Comme tu peux le lire, je n’ai pas une approche très économique de la chose. C’est plutôt de l’ordre de l’intuition, et de l’affectif. Mais c’est de ce genre de chose que sont faites les idées politiques.
PS : Tu peux être aussi « longue » que tu le désires. C’est à ça que sert ce blog, à s’exprimer et à s’expliquer.

Anonyme a dit…

Merci ! En plus j'ai tout compris :) Il faut dire que les métaphores sylvicoles me conviennent bien mieux que l'économie.

Je suis d'ailleurs d'accord avec toi qu'une économie mondiale unifiée qui "lisserait" tout, en détruisant tout particularisme, serait une horreur. Et c'est malheureusement ce pire aspect qui est en oeuvre dans la mondialisation (sans l'aspect positif de l'égalitarisme).

Je rêve d'un autre type d'économie unifié, qui serait "respectueux de l'environnement" humain et régulerait en assurant un bon fonctionnement pour tous (entendre : réduire les disparités, fruits du système éco mondial actuel tel qu'il se développe) tout en respectant la diversité de types d'approche. Mais qu'il s'agisse d'économie, de politique ou de culture, j'ai bien peur que ce soit utopique :(

Gwendal Denis a dit…

Non, pas utopique. Difficile, anti-productif, mais pas irréalisable. Si c’était le cas, y’aurait plus qu’à ce jeter d’un pont. Et quand bien même, l’utopie n’est pas forcément un but à atteindre, mais un but vers lequel tendre. Savoir consciemment que l’on n’y arrivera pas ne doit pas empêcher de faire des efforts… J’aime bien cette idée qui rejoint un slogan de Mai 68 : Soyez réalistes, demandez l’impossible ! Car au final, dans un voyage ce n’est pas le but, c’est le chemin parcouru qui compte.

Anonyme a dit…

C'est un peu une définition de la lucidité ;)
Agir dans une direction en étant conscient qu'on ne l'atteindra jamais... Si quelques-uns ne poursuivaient pas l'utopie, où en serions-nous ?

Anonyme a dit…

gwendal !!! où es-tu passé ? je ne te vois plus sur le fil!
tu ne te serais pas toi aussi évaporé comme lucie ? mais je sens que lucie va réapparaître bientôt !
Intéressante la photo des deux russes ! au premier plan on voit un type goguenard ,un peu rigolard "je vous ai bien eus " au second plan , un visage énigmatique , inquiet ..." Que va-t-il me faire faire ?

Anonyme a dit…

S'cuse moi Lucifer, mais pour une fois, j'ai une vie sociale plutôt chargée ces temps-ci, mon meilleurs ami est descendu de Lyon exprès pour me voir... Depuis deux lours j'ai plus une minute à moi. Mais demain, je reprend ma position contemplative de veilleur, promis!
Y'a dailleurs une certain statuquo qui me cherche des crosses et il faut que je lui réponde...
Mais demain. Ce soir c'est dodo tôt...

Selerines a dit…

@Gwendal : You didnt mention any thing about company name or type of job and so on. But upto my knowledge i can tell you one thing,
For experienced candidates around 60,000 to 70,000 in INR


For fresh candidates around 25,000 to 30,000 in INR

Take care dude...

Gwendal Denis a dit…

At the May 5 article, you can see a work offering, about a computer developer job in India. This job is pay between 10 000 and 20 000 INR for a fresh candidate… The problem is this one: In France the same job, just after schooling, can be pay around 1500 € and 2000 €… (Between 95 000 and 125 000 INR!). For us, this offering is indecent and inequitable for French and Indian work market. The company who hire is a French company, and his name is Hangar 17. You can find her on a web… Thank you very much Selerines for your information and your very quick answer. If you will have some questions about France, and his special population, don’t dither about it!
Kind regards. G.

Fantôme de Lune a dit…

Donc, en plus de tout le reste, l'ANPE ment comme une arracheuse de dents (en or) en disant que "le salaire proposé est quatre à cinq fois supérieur au salaire moyen indien." Pas le salaire moyen d'un informaticien, en tout cas !

Anonyme a dit…

Gwendal, si je comprends bien (j'ai déjà écrit un post similaire, mais je me demande ce que j'en ai fait... je fatigue!!) un web conceptor indien débutant dans son pays est payé trois fois moins qu'un français débutant en france, et pas dix fois moins comme le proposait l'annonce?... right???... où je suis vraiment très fatigué?...

Gwendal Denis a dit…

Ouais… En gros c’est ça. Non ! C’est pas ça ! Toi t’es peut-être fatigué, mais moi, je me réveille à peine… L’annonce proposait de 10 000 à 20 000 INR pas mois en arguant que c’était un salaire quatre à cinq fois supérieur au salaire moyen indien… Alors qu’en fait un développeur débutant indien gagne entre 25 et 30 000 INR ! Donc, le mensonge vient d’une part de l’ANPE qui noie le poisson en se référant au salaire moyen qui ne doit pas être fameux… et d’autre part de Hangar 17 qui se propose de payer son employé largement en dessous de sa vraie valeur (indienne). Mais je demanderais des précisions à Selerines histoire d’être vraiment certain qu’on ne se plante pas… Est-ce qu’on parle bien de salaire mensuel, et d’un type qui aurait Bac+2… Mon anglais a beau faire ton admiration (merci), la barrière de la langue me semble énorme ! Mon vocabulaire est limité et ma grammaire inexistante ! Bon, vu le décalage horaire et qu’il semble dispo plutôt le soir… J’essaierais de le contacter en fin d’après-midi.