Je voulais vous dire…


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samedi 27 février 2010

De la probité en politique

D’habitude, dès que Frédéric Lefebvre ouvre ce qui lui sert de bouche, on peut être à coup sûr certain que les alentours vont commencer à sentir l’égout. C’est naturel chez lui, la pestilence verbale.

Oui, j’ai commencé ma phrase par l’expression « d’habitude »… Vous avez remarqué ? Est-ce que cela veut dire pour autant que cette fois-ci sa logorrhée sent la rose ? Peut-être bien… Ou peut-être pas. En fait j’en sais rien. Nous verrons bien quand j’aurais fini ce texte qui me tiendra lieu de réflexion.

Reprenons depuis le début. L’affaire porte désormais un nom, c’est l’affaire Ali Soumaré. Et celle-ci empoisonne l’air de la campagne électorale en IDF depuis bientôt une semaine.
En clair et pour faire vite, deux lascars de l’UMP, Francis Delattre et Pascal Meurant, ont déclaré dans un bel ensemble que le candidat PS du Val d’Oise, Ali Soumaré, était je cite « un délinquant multirécidiviste ».
Diantre, cela ne lui suffisait pas d’être noir comme un joueur de l’équipe réserve du PSG, voilà que le jeune politicien en herbe traine derrière lui des casseroles grosses comme des faitouts !
A droite on jubile et on relaie l’info sans trop y réfléchir, et à gauche on s’interroge benoitement pour détourner l’attention : « Et comment vous savez ça, d’abord ? ». Bref, le bordel s’installe et la presse, comme la blogosphère, s’enflamme.
Manque de bol pour les nervis de droite, il s’avéra qu’une partie des accusations concernait un homonyme… Mais bon, qu’à cela ne tienne, il n’empêche que le Ali Soumaré n’est pas blanc comme neige (Oups !).

Pendant toute la semaine, on a entendu un peu tout et n’importe quoi mais la plupart du temps à gauche il s’agissait soit de noyer le poisson en criant au procédé indigne, soit de ramener l’affaire sur le terrain du racisme, toujours payant en période électorale. Ou encore, dans le camp d’en face, de dire qu’il n’y a pas de fumée sans feu (ça marche toujours l’histoire de la fumée sans le feu…), que quelque soit les gesticulations des bien pensants il n’en reste pas moins que le bonhomme est suspect… Bref, on parle le plus souvent dans le vide, rendant coup pour coup au fur et à mesure qu’on en reçoit un.
Tiens, d’ailleurs si les échanges des uns et des autres vous intéressent, vous n’avez qu’à écouter le toujours excellent Didier Porte qui vous en fait le résumé de façon exhaustive… Et rigolote.



Mais bon, ce n’est pas de ça dont je voulais vous parler… Souvenez-vous, je vous disais en préambule que Lefebvre avait de nouveau ouvert sa bouche et que pour une fois c’était pour ne pas forcément dire une connerie.
Il a proposé hier que désormais les candidats rendent public leur casier judiciaire et qu'ils soient rendus inéligibles s'ils ont été condamnés pour des actes de "violence contre des personnes".
Si vous n’avez pas entendu ouvrir ma gueule sur l’affaire Soumaré pendant toute cette semaine, et bien c’est parce que je suis plus ou moins d’accord avec Frédéric Lefebvre. Oui, je sais, moi aussi ça me fait mal au cul, mais c’est comme ça.

Car, ceux qui me lisent régulièrement le savent bien, je suis comment dirais-je… assez intransigeant en ce qui concerne la probité des élus ou celle de ceux qui concourent à l’être. Pour moi, un élu se doit d’être irréprochable, point barre. La moindre suspicion, la moindre parcelle de doute quant à l’honnêteté d’un élu, ou encore je le répète de quelqu’un qui veut l’être, devrait à mon sens le disqualifier d’office.

Alors bien sûr, j’ai conscience que ce jugement moral à l’emporte-pièce se heurte à plein d’autres considérations toutes aussi morales. Je me suis déjà fritté sur le sujet avec des blogueurs de gauche quand il fut s’agit de Julien Dray et de ses indélicatesses comptables et je me suis reçu la présomption d’innocence en pleine figure (Bon, sauf que Juju n’était pas aussi innocent que ça…). De même, j’ai moi-même défendu sur la TéléLibre le droit à l’oubli… Tiens, d’ailleurs j’ai retrouvé ce que j’écrivais à l’époque. C’était en septembre 2008, et c’était au sujet du fichage des enfants à partir de 13 ans…
Je disais : « Sans rentrer dans un débat philosophique, notre société est basée sur un principe selon lequel l’homme est perfectible. Les gens changent, et plus particulièrement les jeunes gens. Qui peut dire qu’il est exactement le même qu’à l’âge de 13 ans ? Personne. Marquer ainsi une erreur de jeunesse, ou pire une bêtise d’enfant, c’est renier ce principe de perfectibilité de l’être humain. Ficher un enfant, c’est faire le pari que son avenir sera le même que son présent, la délinquance. »
Mais bon, il s’agissait-là d’enfants et non-pas d’ados ou même d’adultes…

Comme vous l’avez sans doute compris, il y a là comme une contradiction dans mes jugements.
D’un côté j’ai comme une réaction épidermique lorsque j’apprends qu’un élu, quelque soit son bord, s’est rendu coupable d’un délit quelconque. Je serais prêt à le démettre de ses fonctions au moindre soupçon et à le rendre inéligible à vie si les faits s’avéraient exacts, quitte à jouer le jeu de quelques horribles diffamateurs… Et d’un autre côté, j’ai des principes moraux qui me collent aux basques et auxquels je suis bien obligé de souscrire, comme la perfectibilité humaine par exemple, ou encore la résomption d’innocence… Principes moraux s’il en est, garants d’une démocratie digne de ce nom.
Pas très confortable comme situation vous en conviendrez.

Alors reprenons la déclaration de Lefebvre : Pour lui les candidats à une élection devraient rendre public leur casiers judiciaires. Là, je suis d’accord. A partir du moment où une personne prétend vouloir me représenter, j’estime être en droit de savoir ce qu’il a fait de mal dans sa vie, et c’est moi et moi seul qui suis juge de la confiance que je peux lui accorder.
Après tout, pour intégrer certains postes de la fonction publique, n’est-il pas demandé aux postulants d’avoir un casier judiciaire vierge ? Il me semble bien que c’est le cas pour la police par exemple…
Je ne vois pas en quoi quelqu’un qui prétend être un représentant du peuple ne devrait pas souscrire aux mêmes critères moraux qu’un représentant de la loi. D’ailleurs, si je ne m’abuse, la plupart des élus ne sont-ils pas de fait Officier de Police Judiciaire ? Les maires par exemple ? Si, bien sûr.
Aussi, je ne vois pas pourquoi ce qui est valable pour un flic ne le serait pas pour un maire, un conseiller régional, un député ou même un ministre. Je dirais même que ce serait valable a fortiori.

Ensuite, le roquet de son maitre propose que les personnes condamnées pour des actes de "violence contre des personnes" soient rendus inéligibles. Pourquoi seulement pour des violences aux personnes ? Hein ? Pourquoi ne pas étendre cette règle aux délits financiers par exemple ? Aux abus de biens sociaux, au détournement de fonds publics, j’en passe et des plus graves.
Sachant que je considère que la position d’élu dans le cadre d’un délit financier devrait être considérée comme une circonstance aggravante, il n’y a pas de raisons pour que l’on s’arrête en si bon chemin…

En fait, j’ai peut-être trouvé une position intermédiaire qui me permettrait de satisfaire à la fois mon désir de probité en matière de politique et le légitime droit à l’amendement et à l’oubli…

L’idéal serait de rendre obligatoire la publication du casier judiciaire de toute personne prétendant à une élection, quelle qu’elle soit, et de laisser le choix à l’électeur de considérer en conscience si tel ou tel délit mérite son indulgence ou pas. Pas d’inéligibilité, juste le jugement populaire. Comme aux Etats-Unis ! Là-bas, la moindre faute découverte, et c’est goodby Monsieur ! Les types n’envisagent même plus de se présenter s’ils n’ont pas un passé d’une blancheur immaculée !

Mais bon, soyons honnêtes, il y a des délits qui ne méritent pas l’opprobre pour autant. Si le candidat s’est fait gauler en train de fumer du shit à la fac, ça n’a quand même pas le même poids que s’il avait volé de l’essence et pris la fuite à bord d’un Simca… Non, ce n’est pas vraiment la même chose. (Cliquez pour agrandir la photo !)
Le souci c’est que même si je crois le peuple capable de jugement, je le sais aussi oublieux.

Grrrr !!!! Quel casse-tête ! Tout serait si simple avec une méthode plus radicale ! Pas une seule ligne sur le casier sinon, pas d’élections ! Mais en même temps, je connais des tas de types et de nanas qui sont d’excellentes personnes et à qui je confierais les clefs de chez moi, alors qu’ils ou elles ont fait des conneries dans leur jeunesse ! Moi le premier d’ailleurs.

En fait, je m’aperçois que dans cette histoire, et comme me le faisait remarquer récemment fort judicieusement l’un d’entre vous, j’idéalise peut-être un peu trop la position de l’élu. Il n’est qu’un être humain après tout. Et l’être humain est paradoxal par nature…
Alors pourquoi est-ce que je place la barre aussi haute en ce qui les concerne ? Franchement je ne sais pas.

Maintenant, juste pour le fun, imaginons un instant que je sois électeur dans le Val d’Oise… Est-ce que je voterais, en dehors de toutes considérations politiques, pour un ex-caïd de quartier reconverti ? Peut-être. Tout dépendra je pense des preuves de réhabilitation qu’il aura su donner depuis les faits.
Est-ce que je voterais pour un candidat jugé coupable dans une affaire de détournement de fonds publics ? Peut-être pas. Ou alors c’est qu’il aura su donner un ENORME tas de preuves de réhabilitation depuis les faits.

Mais pour ce faire, encore faut-il que je sois au courant du passé dudit candidat…

Bon, j’en suis à trois pages d’écritures, et je n’en suis pas plus avancé. Alors, si vous avez su supporter la longueur de cette réflexion profonde, j’imagine que vous aurez également suffisamment de patience pour me fournir quelques remarques constructives. Je compte sur vous !