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mercredi 19 août 2009

La chaleur tue, la prison aussi

Il y a quelque temps, l’administration pénitentiaire, soucieuse de l’augmentation des suicides en milieu carcéral, décide de commander un rapport auprès d’un psychiatre, Louis Albrand.
Il est vrai que la situation a de quoi inquiéter. Je rappelle les chiffres : 115 suicides en 2008, soit deux fois plus qu’en Allemagne ou en Grande Bretagne, trois fois plus qu’en Espagne.
Et encore, il ne s’agit-là que des chiffres officiels. Car d’après les associations qui s’occupent du sujet, il y aurait pas mal de bidonnage en la matière. Mais bon, malgré ça il n’en reste pas moins que nos prisons françaises tuent plus efficacement que la grippe A.

Donc, Louis Albrand, consciencieux comme un psychiatre, rend son rapport en temps et en heure, avec à la fin plein de préconisations pour enrayer se phénomène qui, il faut bien le dire, entache sacrément notre belle image d’Épinal de « pays des droits de l’homme ».

Quelques mois plus tard, à la faveur d’un mois d’août encore plus chiant et chaud que les autres, la nouvelle ministre de la Justice Michelle Alliot-Marie se rend (sous les huées) à la prison d’Orléans. Son job du jour, commenter ce fameux rapport et dévoiler les mesures que le gouvernement compte prendre en matière de prévention contre le suicide.
Et c’est là que l’auteur dudit rapport a la surprise de constater que les conclusions que la ministre en tire sont un tantinet éloignées de celles qu’il avait prescrit au préalable…
Pour lui, « la ministre ressort la version édulcorée du rapport… La version light, pas celle que j’avais remis en décembre au ministère. Je suis triste, déçu et inquiet. J’espérais que Michèle Alliot-Marie, avec sa réputation de gaulliste, ait du courage politique. Elle prend à nouveau le problème des suicides dans les prisons par le petit bout de la lorgnette. Et pendant ce temps, des jeunes se suicident dans nos prisons. Si la ministre avait la volonté politique d’adopter les mesures que je préconise, des vies auraient pu être sauvées. Je n’ai pas peur de le dire : aujourd’hui, la ministre n’a pas le souci de sauver des vies. » Et vlan ! Dans la bouche à MAM !

Il est vrai que le gouvernement semble n’avoir retenu qu’un des volets de ce plan anti-suicide. La partie « action visible », celle qui en jette devant les médias. Pour preuve, l’utilisation à tout bout de champ de l’expression « Kit de protection » constitué de pyjamas en papier, de matelas anti-feu et d’autres joyeusetés du même acabit.
Bref, l’administration n’a retenu que les actions destinées à empêcher physiquement le suicide de se produire. Mais elle a complètement oublié de s’intéresser aux raisons pour lesquelles les détenus se tuent.

Pourtant, Luis Albrand en parlait dans son rapport… Il en parlait bien même. Il préconisait d’accélérer les procédures, de réduire le temps de mitard, de facilité les contacts avec l’extérieurs… En somme il préconisait d’humaniser un peu le milieu carcéral afin que celui qui y est confronté ne perde pas pied avec la réalité… Et ne distingue plus les raisons de vivre.

Mais non, ça la MAM elle s’en tamponne. Ce qu’elle veut c’est satisfaire la base électorale de l’autre tache. Celle qui considère que les gens en prison le méritent forcément, et que si ceux-ci se pendent, c’est tout bénef pour la société…

Je rappelle juste au passage que 14% des détenus souffrent de psychoses avérées (dont 7% de schizophrénies) et 40% de troubles dépressifs.

Aujourd’hui, la météo prévoit une alerte à la canicule dans ma région, et les médias sont aux petits soins pour les vieux qui ne boivent pas assez… Et dans nos prisons, combien y aura-t-il de morts à la fin de cette journée ?