Je voulais vous dire…


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mercredi 22 avril 2009

Bienvenue en Sarkoland…

Mais qu’est-ce qu’il se passe avec ma ville ? On est dans la capitale de Sarkoland ou quoi ?
Voilà encore ce matin le genre de question qui m’habite alors que je m’apprête à vous relater ma petite expérience de la visite présidentielle. Je suis dans l’expectative, le questionnement, la déception aussi…

Pour ne rien vous cacher, dès ce lundi, lorsque j’ai appris (fortuitement) que notre bien aimé Président Glorieusement Elu comptait descendre sur la Côte d’Azur pour y prononcer un discours sur la sécurité, je me suis demandé si j’allais faire quelque-chose… Ou pas.
Après quelques longues minutes de réflexions, je me suis dit qu’une occasion comme celle-là ne se représenterait pas de sitôt et qu’il serait dommage que je n’y assiste pas.
Deux raisons ont motivé ma décision d’y aller : D’une part, j’étais curieux de « toucher du doigt » ce que j’avais vu à la télé sur les visites hautement sécurisées de Sarkozy, c'est-à-dire les quartiers bouclés, les passants refoulés, les forces de l’ordre omniprésentes, les manifestations, les échauffourées… Bref, je ne m’en cache pas, j’avais une petite envie malsaine d’assister à de la baston. Je voulais être le témoin de quelques abus de pouvoir et, le cas échéant, être capable de les dénoncer ici-même. Je sais ! Ce n’est pas très glorieux comme motivation, mais je me dis que quelque-part elle est un peu humaine malgré tout.

Ensuite, deuxième raison, je me suis dit que si je voulais être en adéquation avec moi-même, avec ce blog, avec vous mes lecteurs ; Si je voulais être cohérent avec mes attentes et les vôtres… Et bien, il fallait bien que je me sorte un peu les doigts du cul et que je bouge mon lard ! Bref, que je prenne quelques risques…
Or donc, la veille au soir ma décision était prise j’allais me rendre sur les lieux et voir un peu ce qu’il s’y passait. A partir de là, j’ai essayé de me renseigner plus avant sur cette visite. J’ai parcouru le net à la recherche d’informations, assez rares il faut bien le dire, et j’ai appris que l’ex-ministre de l’Intérieur comptait se rendre en deux endroits distincts.

Tout d’abord dans le quartier des Moulins, vers 11H00 pour y inaugurer le tout nouveau bunker des poulets… Oh ! Pardon ! Le tout nouveau commissariat de police ultramoderne, high-tech et tout, et tout… Puis, au centre Acropolis, vers midi, pour y faire un discours et y annoncer quelques mesurettes de bon aloi en ces temps de crises…

« Oh cruel dilemme ! » « Où vais-je donc pouvoir me rendre pour satisfaire ma soif de vérité ? » Me suis-je demandé… Etant donné mes motivations, celles dont je vous ai parlé plus haut, j’ai assez vite opté pour la visite du commissariat. Tout d’abord parce que c’est plus près de chez moi : Je veux bien bouger ma graisse mais si je peux faire plus simple, je ne m’en prive pas ! Ensuite, je me suis dit que les Moulins, c’est un des deux quartiers « sensibles » de Nice… La police n’y rentre qu’avec l’appui des chars et jouie d’une réputation on ne peut plus dégradée.

Un tout nouveau commissariat, d’après ce que j’ai pu lire ICI, serait plutôt vécu comme une provocation…
« Super ! » me dis-je. Si je veux satisfaire ma soif de sensationnel c’est donc là qu’il faut que je me rende !

Le lendemain, hier donc, je me préparais pour une journée que je supposais pleines de lacrymos et de courses effrénées… Papiers en règles, bouteille d’eau, foulard, et batterie de mon APN chargée à bloc. Vers 09H00, je montais dans le bus qui devait m’amener vers les lieux de la petite sauterie. Je me disais qu’il valait mieux prévoir large niveau timing, tant la circulation devait être perturbée… Chemin faisant, alors que je me rendais compte que finalement ça roulait plutôt bien, je me demandais jusqu’à quelle distance j’allais bien pouvoir continuer sur cette ligne avant qu’elle ne soit détournée…

A l’approche des Moulins, je levais les yeux de mon bouquin, pour constater que rien ne semblait gêner la progression du bus. Tout à coup, une passagère pousse un petit cri de surprise et désigne du doigt une longue file de camionnettes estampillées Police Nationale. On approche ! Me suis-dis.
La flicaille est là, en tenue de combat… Enfin presque, en semi-tenue dirons-nous. Une centaine de mètres plus loin, alors que j’approchais de la digue des Français, toujours dans mon bus qui ne semblait pas vouloir dévier de sa route, j’aperçois enfin l’objet de l’inauguration. Le nouveau commissariat ! ‘Tain qu’il est grand ! Mais c’est une caserne ma parole !

Tranquillement, comme si de rien n’était, le bus passe devant l’entrée où poireaute déjà un parterre d’uniformes divers et de journalistes, pour aller… S’arrêter quelques dizaines de mètres plus loin ! Pile à l’arrêt habituel que j’utilise pour me rendre à l’ANPE !
Je descends, et là, je vous l’avoue, je suis resté un peu con… Mais qu’est-ce que c’est que ce pataquaisse ? Ya dégun ? (Et oui, il m’arrive de m’exprimer en provençal dans ma tête !)

Je prends ma première photo d’où je suis, celle-là à côté. A part quelques barrières et très peu d’uniforme autour, rien ne semble bloquer le quartier. La circulation est maintenue… Quelques badauds sont accoudés aux barrières et jettent un regard interloqué sur le spectacle. Puisque rien n’entrave ma progression, et que je suis vachement en avance (il est 10H15), je me promène parmi eux et capte quelques bribes de conversation. La plupart ne savent même pas ce qu’il se passe ! Je le crois pas ! Mais je suis où là !

Pendant le temps qu’il me restait, j’ai donc baguenaudé… Peu à peu, je me rends compte que je me suis bel et bien planté… Moi qui imaginais le pire, souhaitais le pire pour être franc, je me retrouve dans une gentille inauguration au service de sécurité plus que restreint. Les gens qui sont là ne sont présents que parce qu’ils passaient par là et rien de plus… Pas de claque umpiste ni de manifestants ulcérés… Rien. Je les entends parler entre eux, ils sont curieux et intrigués comme s’ils allaient apercevoir un truc pas banal, mais pour autant pas si important que ça… Il y en a même qui partent, parce qu’ils ont tout simplement d’autres choses à faire…

La déception que j’ai ressentie au début, est vite remplacée par l’affliction. Une telle absence de conscience politique me désespère. Je me sens un peu seul avec mes idées de citoyens responsable, concerné et militant… J’ai l’impression de faire tache parmi tous ces badauds inconscients.
Dans les rassemblements populaires, il n’est pas rare que l’on sente physiquement la communion des pensées… Vous voyez de quoi je parle ? Vous êtes là, et vous savez que votre voisin à peu ou prou les mêmes choses dans la tête que vous… De même, si vous allez à une manifestation à laquelle vous êtes opposés, vous pouvez sentir que l’engouement général ne va pas dans le même sens que le votre…
Mais là, je ne ressentais que le vide. Le néant culturel, politique et humain. J’avais l’impression de me balader parmi ce que je considère être le pire des dangers : L’indifférence. J’évoluais parmi des vaux qui n’attendent qu’une chose, leur ration de maïs.

J’engageais de piètres conversations avec de simples quidams à peine concernés. Autour de moi les enfants demandaient à rentrer à la maison… Des ménagères s’en allaient pour préparer la popote… Des joggeurs, après un temps d’arrêt ponctué d’étirements, reprenaient leurs courses…

Et puis le cortège est arrivé. Le chef de l’Etat, le premier personnage du pays est descendu de sa belle limousine pavoisée au couleur de la France pour serrer quelques paluches et s’engouffrer presque immédiatement dans le bâtiment. Un cerbère aux épaules aussi larges que sont costume était étroit m’oblige à me déplacer pour me pour trouver un meilleur angle… L’œil rivé à l’œilleton de mon appareil je cherche ma cible… Clic ! C’est bon, j’l’ai eu ! De dos…
Autour de moi, quelques voix prononcent le nom de la ministre de la Justice : C’est Rachida ! C’est Rachida !
Ah bon ? Elle était là ? Moi j’ai rien vu avec mon œil dans le viseur… J’écoute mon voisin qui me dit qu’il a vu aussi « la ministre des policiers » mais qu’il ne se rappelle plus comment elle s’appelle… D’un ton dégouté que j’ai du mal à maitriser, je lui rétorque : « Alliot-Marie… ».

Pendant que l’aréopage présidentiel fait son petit tour dans le bunker aux couleurs du pays, je m’intéresse au va-et-vient des personnels de sécurité. Je repère le GIPN posté sur le toit qui scrute les environs à la jumelle. Les gardes du corps en civil fument la clope en attendant que ça se passe… Non, pas tous… L’un d’eux (lui en dessous) traverse la rue et se dirige vers ma droite en appelant d’un geste un collègue. Ils refont un passage de la droite vers la gauche, le premier parlant à l’oreille de l’autre… Mon voisin dit alors à voix basse : « Ah ! Je crois qu’ils ont repéré quelque-choses… ».
Sans réfléchir, je lui réponds sur le même ton : « Oui, je crois que c’est moi… ».
Malgré les lunettes de soleil, il m’avait bien semblé que leurs regards étaient dirigés sur moi… J’en étais à me dire que ma réflexion était peut-être un peu prétentieuse et qu’à se sentir différents de ceux qui m’entourent je virais paranoïaque lorsque un homme s’est littéralement matérialisé à mon côté ! (Je ne l’ai ni vu ni entendu arriver le bougre !) Il est près, très près, il me coince contre la barrière de sécurité…
« Bonjour Monsieur » me dit-il à voix basse mais d’un ton poli.

Les choses se sont alors très vite passées. Alors que je répondais à son bonjour d’un ton vachement naturel (si !) j’avisais son regard braqué sur mon sac. Alors même qu’il allait me demander de l’ouvrir pour vérifier son contenu, j’obtempérais avec le sourire ! Si bien qu’il n’eut pas l’occasion de finir sa phrase ! Rassuré par son contenu, mais peut-être un peu déstabilisé par mon anticipation des événements, il balbutia un « Merci Monsieur, bonne journée ! ». « Bonne journée à vous ! Ais-je répondu avec un large sourire légèrement provocateur.
Mon voisin me demanda alors comment j’avais fait pour deviner. Je lui répondis crânement que c’était évidant… Je gardais pour moi, les battements saccadés de mon cœur et les tonnes de questions qui me traversaient l’esprit. Qu’est-ce qui avait pu me rendre suspect à leurs yeux, si ce n’est mon propre sentiment d’être différents des autres ? Vaste sujet qu’à mon avis je n’ai pas fini d’explorer !


Une quarantaine de minutes après l’entrée du roi dans son château fort, les protagonistes de la scène s’agitèrent soudain. On écrasa les clopes, la voiture démarre et les plantons de service reprennent leur position. Encore plus vite qu’il n’était rentré, Notre PGE descend les marches du commissariat et s’engouffre dans la limousine. Je n’eu que le temps de prendre deux photos plutôt moches, mais que j’ose vous montrer quand même ! Les autres ministres, Woerth, Dati et Alliot-Marie empruntèrent la porte de derrière… (?)

Moins de cinq minutes après le départ du cortège présidentiel, la circulation reprenait ses droits et je sautais dans le premier bus en direction de mes pénates. Fin de l’histoire.

Alors, maintenant que j’ai fini de vous raconter cette journée de moins de trois heures, il me faut bien faire un petit bilan…
Tout d’abord, même si je ne renie en rien mes motivations premières, je dois encore et toujours me méfier de mes préjugés. Je m’attendais à ce que la vérité soit moche, j’étais venu pour ça, et il n’en a rien été. Tant mieux, me direz-vous… Ou pas, c’est selon. Les débordements sont certes regrettables, mais ils sont aussi le signe d’une certaine adéquation entre le combat que je mène et la conception que j’ai de la situation actuelle… Mais de là à assister à un tel manque de réaction !
Positivement ou négativement, je m’attendais à ce que les gens réagissent… Mais non, ils se sont sentis à peine concerné par la chose.

Aussi, je ne peux m’empêcher de me poser tout un tas de questions qui n’ont, malheureusement, pour l’instant aucune réponse :
La vision du combat que je mène, de ma colère et de mon désir de résistance est-elle juste ?
Ne sommes-nous pas, finalement, qu’une pathétique minorité enfermée dans ses certitudes mais hélas inconsciente du vrai désir populaire ?
Ou bien, et là j’ai peut-être déjà un début de réponses, les minorités agissantes n’ont-elles pas un plus grand combat à mener contre l’inertie et la passivité que contre le pouvoir en place ?

Vaste champ de réflexion que je vous laisse défricher à votre guise mes bons amis… Mais, à mon avis, la route est encore longue avant que le peuple ne se réveille.