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lundi 14 septembre 2009

La mort au travail

Vingt-trois morts… Vingt-trois morts en dix-huit mois. Voilà ce dont est responsable le management atroce d’une entreprise autrefois nationale, et maintenant soumise aux règles du libéralisme. Et encore, les chiffres ne nous parlent pas des vies brisées, des démissions forcées et des familles désunies provoquées par ce même libéralisme.

Par delà ce chiffre, ignoble en lui-même, je ne peux m’empêcher de penser à l’histoire de ce type qui pendant des années s’investit dans son entreprise…

Bon d’accord, ce n’était pas un type particulièrement bien dans sa peau au départ… Mais bon, l’un dans l’autre il arrivait à combler le vide de sa vie personnelle en se comportant comme un employé modèle. Pour ça oui, on peut dire que s’en était un.

Il ne rechignait pas à la tache, et les heures sup’ ne lui faisait pas peur. Il lui est même arrivé quelques fois de revenir bosser alors qu’il était en vacance ! Et oui, on avait besoin de lui, et ça le rendait fier.
On le payait bien. Enfin suffisamment plus que les autres pour qu’il se sente obligé d’en faire toujours un peu plus que les autres.
Il avait des responsabilités, pas trop au départ, puis de plus en plus. Et avec elles il se sentait utile.
On lui décrivait des perspectives d’avenir et de réussite. Comme il croyait que s’il arrivait à s’épanouir professionnellement, il arriverait sans doute à le faire aussi sur un plan plus personnel. Alors il bossait. Il bossait dur.

Et puis un jour, tout doucement, sans vraiment qu’il ne s’en rende compte, la charge de travail qu’on lui demandait devint lourde. Très lourde. Et pour arriver à la supporter, il en vînt à chercher ailleurs que dans son propre corps l’énergie nécessaire à sa tâche… Il se mit à picoler pour se donner à la fois force et courage.

Pendant un moment le truc marcha. Il débordait de vitalité. Mais bien sûr, sa direction s’en est vite aperçue… Mais plutôt que de mettre le holà, ne serait-ce qu’en le virant, ses patrons le gardèrent bien au chaud pour profiter à loisir de son sentiment de culpabilité. Ils savaient. Le type savait qu’ils savaient. Il en faisait donc encore plus pour ne pas faillir et assurer son rôle… Et cela dura pendant des sept années.

Puis la crise arriva et les conditions de travail se dégradèrent. Des commandes qui n’arrivent pas, des clients à juste titre insatisfaits, des ventes qui baissent… La pression se fit de plus en plus pesante, de plus en plus insupportable. Et au fur et à mesure que la tolérance quant à ses écarts se transformait en chantage, il perdit pied…
Burnout disent les anglo-saxons, ou syndrome d’épuisement professionnel selon la faculté de médecine.
Le type craqua. Il balançât sa démission comme d’autres lancent un dernier SOS.

Quelques temps plus tard, du fond de son hôpital où son malheur l’avait conduit, il supplia son patron de le laisser reprendre sa démission. Il risquait de perdre bien plus que son travail. Le toit sur sa tête était en jeux…
Celui-ci refusa, trop content d’avoir put se débarrasser, sans avoir à débourser d’indemnités, de cette ligne de salaire devenue bien trop encombrante en ces temps de crise.

Alors, il s’enfonça encore plus, jusqu’aux limites de la vie…

Bon, je vous rassure tout de suite, le type s’en est finalement sorti. Mais ce fut un long chemin, jalonnés d’hôpitaux, de maisons de repos et autres lieux où il apprit à se refaire confiance…

Quand je pense à ce type, je me dis qu’il a de la chance.
Je me dis qu’il a de la chance car s’il avait bossé pour France Télécom, il ne serait peut-être plus là… Et que peut-être qu’au lieu de se suicider professionnellement, il aurait pu se suicider tout court… D’ailleurs, parfois je me demande s’il ne la pas finalement fait. Métaphoriquement parlant, j’entends ! Parce que là, aux dernières nouvelles, il va plutôt bien !
Surtout depuis qu’il sait maintenant que la réussite professionnelle n’est en rien garante d’un bien être personnel. Bien au contraire, le travail lorsqu’il ne s’occupe que de lignes de dépenses et en oublie l’humain, peut tuer aussi sûrement qu’une balle.

Seul compte la vie.

12 commentaires:

philippe a dit…

Toujours se demander pourquoi on travaille et pour qui...çà ne m'a pas rendu la vie facile mais quand le pli est pris, c'est fini on ne peut plus faire autrement que de laisser la place à cette petite question intérieure "pourquoi tu fais çà?" C'est aussi un travail que de se l'imposer.

Gwendal Denis a dit…

Je crois que le type à compris que maintenant, ce qui importe c’est de faire des choses utiles pour lui avant tout.

Jerry OX a dit…

les ravages de l'abrutissement au travail et du capitalisme sauvage qui ruine la santé morale et physique des employés ...il est grand temps de secouer le cocotier !

joli ton nouveau design !
a song for you : http://www.youtube.com/user/Jerryox69

Gwendal Denis a dit…

Ouais ? J’ai décidé d’éclaircir un peu… Juste pour voir ce que ça donne. D’ailleurs ne vous gênez pas pour me dire ce que vous en pensez !
Merci beaucoup Jerry pour la chanson. C’est tout à fait à propos.

Monique a dit…

Ne pas oublier non plus tous ceux et celles qui sont en dépression sans passer à la solution finale mais qui souffrent, culpabilisent d'être malades, se replient sur eux mêmes, n'ont plus de vie tout court...
Oui, se demander : à quoi ça sert ?
Relativiser l'importance du travail qui est resté depuis le fameux travail- famille-patrie de Pétain, la dernière "valeur" incontournable inculquée au bon peuple ( la famille et la patrie ayant pris un bon coup dans l'aile)

Dans le langage populaire autrefois on disait "gagner son pain ou sa croute" puis "gagner son beefsteak" aujourd'hui, on dit encore "gagner sa vie" alors qu'il s'agit le plus souvent de la perdre pour survivre.

Se poser la question..oui, mais certains ne se permettent pas ce luxe...faut bouffer et donner la becquée aux oisillons ...alors, on continue à tirer la charrue, jusqu'au précipice.

J'avais envie de me désabonner de F.Telecom...mais les autres ????

Question design, Gwen, je préférais l'autre...je trouve celui ci un peu froid !
Mais le flacon n'est pas l'essentiel, tant qu'on a l'ivresse !

Gwendal Denis a dit…

C’est quoi déjà ? « Non pas travailler plus pour gagner plus, mais travailler moins pour vivre mieux ? »
Ok, je note : Pour le design : un pour, une contre…

Pseudo a dit…

AIE MES YEUX!

Tu veux nous rendre aveugle Gwen hein? C'est ca?

Reviens vite a des ton plus sombre, c'est plus reposant pour les yeux et en plus ca fait économiser de l'énergie.

Gwendal Denis a dit…

Deux contres, un pour...
Bon, ok J'ai compris. moi aussi ça me déplait. On revient donc au fondamentaux!

cazo a dit…

Classieux... mais clash yeux surtout !!

Allons, Gwen, tu sais bien que ce qui fait la luminosité de tes pages c'est ton éclairage sur les sujets que tu pêches au petit matin dans cette mer d'info!!

Autrefois, il fallait dégraisser... maintenant, ils tannent, parce que du gras comme du maigre, y en a plus, y a plus que la peau sur les os !!

Le management à la française se fait sans ménagement. Mais c'est pas étonnant, on est comme un type qui se plaint que ses chaussures lui font mal et va s'en acheter une paire neuve, mais d'une pointure en dessous. Bref, moins ça va, pire c'est. Tiens, pour rigoler sur le management, je vous en refourgue une vieille mais que j'adore...

cazo a dit…

Les rameurs technocrates

En 1999 a eu lieu un challenge d'aviron entre l'équipe des rameurs de la Technocratie et ceux de l'Académie des Hommes de Terrain.

Les rameurs de l'Académie arrivèrent avec 10 minutes d'avance sur l'équipe de la Technocratie.

De retour dans les locaux de la Technocratie, le Comité Supérieur d'Analyse se réunit pour étudier les causes d'un résultat si imprévu.

Les constatations furent les suivantes :
1) L'équipe de l'Académie était formée d'un chef d'équipe et de 10 rameurs;
2) L'équipe de la Technocratie était, elle, composée d'un rameur et de 10 chefs d'équipe.

Le Comité demanda à l'Ensemble Majeur de Planification Générale de mettre en place, pour l'année suivante, une réforme.

En 2000, lors du départ du nouveau challenge, l'équipe de l'Académie reprit une fulgurante avance.
Cette fois-ci, l'équipe de la Technocratie arriva avec 20 minutes de retard.

Face à ce nouvel échec, le Comité Supérieur d'Analyse, après étude des fiches de l'Ensemble Majeur de Planification Générale prit en compte les faits suivants :
1) Dans l'équipe de l'Académie, il y avait un chef et 10 rameurs;
2) L'équipe de la Technocratie, suite aux réformes décidées par le Comité Supérieur d'Analyse comprenait :
- 1 chef d'équipe,
- 2 assistants au chef d'équipe,
- 7 chefs de section,
- 1 rameur.

Suite à une discussion très ouverte où, avec beaucoup de bon sens, l'analyse du président de l'équipe de la Technocratie fut adoptée avec enthousiasme par la majorité, constatant ainsi avec un sens de la formule lapidaire, que " ce rameur n'était bon à rien ".

En 2001, nouvelle opportunité pour l'équipe des Technocrates. Le Département Central de Coordination d'Analyse de la Technocratie, en collaboration avec le Centre Général d'Analyse, avait mis au point une stratégie novatrice qui améliorerait rendement et productivité. C'était la clé de voûte du succès, l'aboutissement ultime d'une méthodologie qui ferait pâlir d'envie même les meilleurs managers du monde.

Le résultat fut catastrophique. L'équipe de l'Académie arriva cette fois-ci avec 30 minutes d'avance sur l'équipe de la Technocratie.

L'analyse de la situation conforta la pertinence des choix qui avaient conduit à cette situation :

1) Dans un but évident de déstabilisation spéculative, l'équipe de l'Académie avait opté pour une formation traditionnelle : un chef d'équipe et de 10 rameurs;

2) L'équipe de la Technocratie avait introduit une formation avant-gardiste :
- 1 chef d'équipe,
- 2 consultants qualifiés,
- 1 auditeur empowerment,
- 1 superviseur de downsizing,
- 1 analyste de procédures,
- 1 technologue,
- 1 contrôleur,
- 1 chef de section,
- 1 technicien chronomètre,
- 1 rameur.

Après plusieurs jours d'épuisantes réunions et autant de séances de brainstorming, le Comité décida de punir le rameur en supprimant sa bourse d'études et en le radiant de l'Ecole dont la Grandeur et la Réputation risquaient de se voir ternir par une telle incompétence.

Lors de la réunion de clôture, le Comité statua :
" Pour le prochain challenge, nous conserverons la même organisation qui a fait ses preuves, mais nous engagerons un nouveau rameur par le biais d'un contrat d'Outsourcing, de manière à éviter toute implication directe et afin de réduire au mieux les coûts directs sans pour cela dégrader l'efficacité et la productivité des ressources de la Technocratie affectées aux objectifs définis par le Département Central de Coordination d'Analyse et approuvés par le Centre Général d'Analyse dans le cadre d'un Game Plan d'un contrôle de gestion fondé sur l'adhésion des acteurs dans une approche volontariste d'un objectif commun."

Toute ressemblance ou similitude avec votre environnement serait fortuite !

Gwendal Denis a dit…

Mmmm… Je ne suis pas sûr qu’il s’agisse là d’un management à la française, ou de quelque autre nationalité… Il s’agit d’un management libéral, point barre. Avec recherche de profit immédiat au détriment de l’efficacité à long terme et de l’humain.

aslan a dit…

C'est effectivement simplement libéral mais ça marche aussi bien ici car les français font un bétail de premiére bourre (dont je suis). Pas le temps de développer car je dois outsourcer les dents d'un manager qui voudrait downsizer notre accord salarial. Les amis, rendez moi un service: achevez mois si un jour je travaille dans les "ressources humaines", merci d'avance.
Bises.