La lourde porte d’acier glissa silencieusement sur son rail soigneusement huilé, et le général trois étoiles s’effaça pour laisser entrer notre personnage.
Celui-ci s’avance alors dans le couloir d’accès à la salle de commandement, faisant claquer ses talonnettes sur le sol de béton.
Il jeta un regard nerveux au planton qui lui présentait les armes.
Il n’avait jamais aimé les militaires... Depuis son service il les avait en horreur. Il avait subi tant de railleries de leur part, sur ses origines bourgeoises, sur sa taille, qu’il s’était promit qu’un jour ou l’autre il se vengerait. D’ailleurs, depuis son accession au pouvoir, il n’avait pas raté une occasion de le faire.
Et cette fois encore, de savoir qu’il allait pouvoir passer un savon à cette tripotée de galonnés la faisait presque bander.
Il entra dans la salle et s’assit sans un regard aux six officiers qui faisaient cercle autour de la table. Volontairement il laissa s’écouler quelques secondes avant que d’inviter son auditoire à s’assoir.
-Messieurs, je vous écoute. Dit-il d’un ton exagérément sévère, alors qu’un tic nerveux agitait son épaule droite.
Un des officiers, un amiral, s’éclaircit la voix avant que de prendre la parole d’un ton monocorde.
-Monsieur le Président, l’opération Sauterelle Bondissante, que nous avons engagé sur le territoire Malien dans la journée du 22 ...
-Qu’est-ce que vous avez foutu bordel ! L’interrompit le Président.
L’officier de marine lui jeta un regard incrédule. Il respira un grand coup et s’apprêtait à reprendre son exposé lorsque le chef de l’état l’interrompit de nouveau.
-Je vous le demande, qu’est-ce que vous avez bien pu branler pour que cette opération merde à ce point !
-Monsieur le Président...
-Non mais, c’était pourtant pas compliqué ce que je vous demandais ! Vous deviez me ramener ce connard en bon état, pile poil avant la rentrée sociale histoire de remonter ma cote auprès de l’opinion. Et vous, non seulement vous n’arrivez pas à le trouver, mais en plus cet abruti se fait buter dans la foulée.
-Monsieur le Président, nos renseignements...
-Vos renseignements, Amiral, c’était de la merde !
Un Général d’infanterie, un vieux briscard qui en avait vu d’autre, se lança à la rescousse de son collègue.
-C’est toujours pareil avec ces autochtones, on ne peut pas leur faire confiance. Leur ministre nous avait pourtant juré que nous pourrions mettre la main dessus, mais quand nos hommes sont arrivés il n’y avait personne.
-Et alors ? Vous ne pouviez pas vérifier avant de vous ridiculiser ? Les satellites, c’est pas fait pour les chiens que je sache. Vous ne pouviez pas envoyer un drone ou un truc comme ça ? Ca sert à quoi que je vous paye des jouets pareil si vous ne vous en servez pas ?
-C’est que, balbutia un Général de l’armée de l’air, pour que les drones puissent voler, il faudrait aussi qu’on puisse mettre du carburant dedans...
Le Président lui jeta un regard furieux tandis que l’officier supérieur semblait se recroqueviller sur son siège.
-Rien à branler de vos excuses à la con. Ça fait deux fois depuis que j’ai été élu que je vous demande de me délivrer un otage, et ça fait deux fois que vous me le butez !
-Monsieur le Président pour le hippie de la Tanit je veux bien, mais là nous n’y sommes pour rien si ces bougnoules l’on exécuté !
-Rien à battre ! Vous êtes de nuls. De gros nuls. C’est bien simple, la prochaine fois je demanderais à mon pote Obama d’envoyer ses Marines. Au moins si ça foire, on est sûr qu’il n’y aura plus de témoins.
Messieurs, c’est la dernière fois que je vous le dis, il va falloir que vous m’obteniez des résultats et vite ! On en est où avec ces journalistes en Afghanistan ?
- On n’arrive pas à les trouver... Et les ricains non-plus !
-Seigneur... Mais qu’est-ce qui m’a foutu d’une bande de bras cassés pareille !
Quelques minutes plus tard, alors que le Président se dirigeait vers l’ascenseur du bunker situé sous l’Elysée, il fit signe à son conseiller de s’approcher de lui.
-Bon, pour l’instant vous laissez Kouchner s’occuper de ce merdier. Je veux que les journalistes ne s’intéressent qu’à lui et seulement lui. Si jamais ça dégénère, c’est lui qui prendra. Il faut bien qu’il me serve à quelque chose ce con !
Ah, et puis dites à Morin d’accélérer la fermeture des bases militaires. Ça leur ferait les pieds à ces incapables.
-Bien Monsieur le Président.
-Moi je retourne au Cap Nègre retrouver Carlita. Si y’a besoin, ne me dérangez pas, appelez Fillon.
-Bien Monsieur le Président... Et pour Woerth, on fait quoi ?
-Laissez-le se démerder tout en maintenant la pression sur Courroye. Tant que c’est lui qui mène l’enquête, on ne risque rien...
Alors que celui-ci trottait dans le couloir pour rejoindre le perron, on entendit distinctement raisonner la voix du Président Glorieusement Élu.
-Faut vraiment que je fasse tout ici moi...
7 commentaires:
Bravo! On s'y croirait....
@RPH : Merci bien !
Toi, tu vas avoir des problèmes... de GROS problèmes...
Marre des écoutes illégales...
Tu étais encore allé te fourrer sous la table ?
Super! On peut piquer pour un sketch de théâtre ?
bises
@Cazo : M’en fout, s’ils veulent m’attraper faudra qu’ils apprennent à nager !
@Monique : Non, pas sous la table, j’ai piégé une de ses talonnette avec un micro...
RHaâââââââ !
Trop bon !
Excellentissime, cette fiction ! Enfin fiction... Il y a tellement de chance pour que ce soit un reflet à peine plus colorée d'une bien triste réalité...
Merci, Gwendal pour ce billet géniaaaaal ! ! !
@Tsuki : Merci Madame ! Votre enthousiasme me réjouit le cœur !
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