Je voulais vous dire…


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jeudi 12 mars 2009

HADOPI, t’es pas mon amie !

Depuis quelques semaines, à l’image de certains d’entre vous j’imagine, je reçois des tas de mails pour me sensibiliser au projet de loi HADOPI…

HADOPI, n’étant pas comme on pourrait le supposer au prime abord le nom d’une revue littéraire pour enfant, mais bien l’acronyme pour la Haute Autorité pour la Diffusion des Œuvres et la Protection des Droits sur Internet. Donc, il s’agit d’un projet de loi destiné à contrecarrer les téléchargements illégaux d’œuvres musicales, cinématographiques et autres (Dans « autres » vous mettez un peu tout ce que vous voulez !).

Malgré le harcèlement informatif de mes amis (biens intentionnés), je ne suis pas arrivé à m’emparer du sujet… Et oui ! Que voulez-vous, j’ai beau avoir une grande capacité à l’indignation, je ne peux pas forcément me sentir concerné part tout. Et en l’occurrence, la répression contre les téléchargements illégaux, comment vous dire…. Je m’en tape le coquillard avec un os de mammouth trempé dans la moutarde !
Pour la bonne et simple raison que je ne télécharge pas illégalement. Que ce soit de la musique ou des films, je ne le fais pas, un point c’est tout… Ce n’est pas inscrit dans ma web-culture, je suis peut-être trop vieux mais quand je veux un disque ou un film, je me l’achète. A bas prix si possible, mais je fais l’effort de dépenser quelques sous pour que l’artiste qui à créé ce que j’achète, en profite un peu.

Alors vous allez me dire que ce n’est pas parce que je ne me sens pas concerné que je ne dois pas pour autant lutter contre les dérives autocratiques… peut-être. Certainement même.
Je me suis d’ailleurs fait la même réflexion ! Mais comment ce fait-il donc mon cher Gwen (je suis très poli avec moi-même), que tu n’arrives pas à t’intéresser à ça ? Tu pourrais quand même faire un effort, même un petit, pour te sentir solidaire de tous ces gens qui ne vont plus pouvoir télécharger de la musique !
Ok ! Faire un effort, je veux bien… Je suis donc allé jeter un œil sur le net pour voir un peu ce qu’on en disait de cette loi, et essayer de comprendre pourquoi celle-ci créait autant de raffut.
J’ai lu la presse, en long en large et en travers, et je suis même allé faire un tour sur le site La quadrature du net, qui mène le combat contre le projet.
J’ai lu, j’ai lu… et j’ai même fais mieux que ça, j’ai téléphoné à un ami, qu’on appellera P, que je sais grand téléchargeur illégal devant l’Eternel, pour avoir son avis de mec concerné. Bref, j’ai enquêté quoi !

Donc, si j’ai bien compris, l’industrie du disque et du cinéma se casse la gueule ces temps-ci à cause du téléchargement via des sites Peer to Peer (P2P), et le propos de la loi HADOPI, c’est de punir les internautes qui s’approprient une œuvre sans en acquitter les droits. On va tous se mettre d’accord d’emblée, faire ces choses porte un nom, ça s’appelle du vol. Point barre. Un artiste, quel qu’il soit, en à sué des ronds de chapeaux pour écrire ou produire son œuvre, il est normal que celui-ci en touche la juste rétribution. Donc, a priori, je trouve normal que l’on sévisse contre cette pratique qui s’est développée ces dernières années. Un voleur doit être puni, et si on lui coupe son accès internet, il peut toujours s’estimer heureux de ne pas y laisser la main.
Sauf que le problème n’est pas aussi manichéen que ça… Lorsque j’ai interrogé mon ami P, sur le fait de savoir s’il agissait mal, sa réponse fut clairement oui. Oui, copier gratuitement des films (c’est son cas), c’est mal. Mais, il a, dit-il, des circonstances atténuantes.
Ah ! Des circonstances atténuantes, moi j’aime bien ça ! Et qu’elles sont elles ?
Tout d’abord, s’il le fait, c’est d’abord parce que c’est possible… Mouais, il est tout à fait possible de trucider son voisin, mais la plupart des gens ne le font pas pour autant… Donc, ce n’est pas pour moi une excuse valable. Ce n’est pas parce que la technologie existe, que celle-ci va de facto justifier l’acte.
Ensuite, il y a la force de l’habitude. Les internautes, et notamment les jeunes, ne connaissent que ça, la musique et les films gratuits sur internet ! « On ne peut plus revenir en arrière » ! Qu’il m’a dit. « C’est comme si tu rendais la vue à un aveugle de naissance, et que tu la lui retirais ! » à t’il déclaré. Sur le coup, j’ai trouvé l’image assez parlante. C’est vrai quoi ! On ne va pas supprimer une liberté, ou une tolérance si vous préférez, après que les gens en ont profité… Ca ne se fait pas. Sauf que, l’usage faisant loi, ne pourrait pas s’appliquer dans ce cas de figure. Ce n’est pas parce que l’industrie du disque ou du cinéma a un métro de retard sur les avancées technologiques du net, que l’acte se justifie pour autant. Encore une fois, à mes yeux, il n’y a pas vraiment là de circonstance atténuante.

Ensuite, l’argument suivant est que la loi est inapplicable tant les fraudeurs sont nombreux. Même si la multiplicité d’un délit ne le justifie toujours pas, cela reviendrait à mettre un flic derrière chaque internaute ou bien un flic dans chaque serveur… Avec 17 millions de foyers suspects, ça risque de faire pas mal de boulot à la police du net !
Là, on commence à approcher de l’argument qui peut avoir du sens chez moi. Même si l’apparente impossibilité d’une tache ne signifie en aucun cas qu’il ne faille pas s’y atteler pour autant, il est vrai que placer un mouchard dans chaque ordi français, me poserait quelques soucis qu’en à ma liberté individuelle. Même si je vais régulièrement sur des sites pornos, ce n’est pas pour autant que j’ai envie que tous le monde le sache ! (merde ! trop tard !) Bref, le flicage individuel et systématique ne me semble pas une bonne solution, car c’est toujours la même question qui se pose : Où vont les données ?

Enfin, mon pote m’a sorti un argument qui fit vraiment mouche dans mon petit cerveau de contestataire gauchiste… « Tout ça c’était la faute des Majors ! Si toutes ses grandes compagnies ne s’en mettaient pas tellement dans les poches, si les prix des disques et des DVD n’étaient pas si élevés, et bien il n’y aurait pas de piratage ! ».

Ah ! Voilà ! On y est ! Voilà une circonstance atténuante ! Un CD ou un DVD, ne coute pratiquement rien à fabriquer. Quelques centimes d’euros tout au plus. Si l’on prend l’exemple d’un CD à 20 €, ce qui est courant, l’argent généré par l’achat de ce CD, se répartit comme il est montré dans le tableau ci-contre.
On peut constater que c’est la maison de disque qui touche la plus grosse part du gâteau avec 52%, suivie de près par la distribution avec 22%. Ensuite, 19% vont dans la poche de l’interprète. Il faut savoir que ce pourcentage est fluctuant puisqu’il est fonction de la notoriété de l’artiste et peut donc être beaucoup moindre… La différence allant dans la poche de qui ? La maison de disque, bien sûr.
Enfin, 7% vont dans la poche des auteurs (paroles et/ou musique).

La première chose qui saute aux yeux, ce sont les énormes marges que pratiquent aussi bien les maisons de disques que les distributeurs. Des marges indécentes, osons le dire. Aussi, l’argument de mon ami, que je reprends à mon compte, est donc que si ces messieurs déjà pétés de tunes ne se gavaient pas au passage avec tant de goinfrerie, les CD et les DVD ne seraient pas si chers, et on les piraterait moins…
C’est vrai ça ? C’est vraiment vrai ? Pour confirmer cet argument je demande alors à P. combien de DVD pirates il possédait, et sur ces DVD, combien en aurait-il vraiment acheté si les prix n’avaient pas été si élevé… Et par la même occasion, quel serait le prix correct d’un DVD selon lui.
Sur 100 DVD, mon pote m’affirme qu’il en aurait probablement acheté une vingtaine si le prix n’avait pas excédé les 10-12 €. Ici, on touche au concret. La baisse des prix des DVD occasionnerait donc (si mon pote était une référence !), une augmentation de 20% des ventes. Le reste, les 80% restant, sont des films qu’il ne serait de toute façon jamais allé voir au cinéma, ni même acheté le DVD à leur sorties… C’est parlant n’est-ce pas ?
Ca veut donc dire, que le manque à gagné dont les Majors se prévalent n’est réel qu’à auteur de 20% de ce qu’elles annoncent. Déjà et d’une. Et de deux, cela nous démontre que la marchandisation de la culture tue la culture. Enfin… Pour autant que l’on ait besoin de nous le confirmer, bien sûr.

Alors, que faut-il faire ? On est d’accord, le problème est sérieux, mais tout de même pas aussi sérieux que les grandes compagnies veulent bien nous le faire croire. Ensuite, les solutions que le gouvernement veut apporter pour résoudre ce problème sont compliquées, non pas du point de vue de la morale, mais de leur applications techniques.
La solution actuelle qui consiste à avertir le téléchargeur fou deux fois avant de lui couper sa connexion, est aussi débile que la plupart des propositions de ce gouvernement. En effet, il faudrait pour bien faire que l’adresse IP à laquelle on veut s’en prendre, soit rattachée à la personne responsable du délit. Et dans l’état actuel des choses c’est impossible. Donc, je le répète, c’est débile.

La solution, la seule solution d’après mon ami, serait la licence globale. Une taxe, comprise dans le forfait du fournisseur d’accès, permettant tous les téléchargements possibles. Le fournisseur se chargeant ensuite de reverser ces droits aux auteurs et aux compositeurs. Les maisons de disques et les réseaux de distribution sont maintenant devenus quasiment obsolètes. C’est pourquoi, à mon sens ils ne devraient rien toucher… Ou en tous cas, une part, extrêmement minime.

Alors voilà. J’ai bien conscience que je n’ai fait qu’effleurer le problème… J’ai probablement oublié un tas de trucs comme par exemple la taxe sur les CD et les DVD vierges, qui est déjà sensé répondre au piratage. Mais, après avoir examiné de plus près ce projet de loi intitulé « Internet et Création », je pense avoir compris qu’il s’agit là d’une manœuvre supplémentaire orchestrée par de puissantes firmes qui ne supportent pas d’être exclue du monde qu’offre les nouvelles technologies. Ces firmes, ces Majors, réclament de l’argent qui ne leur est pas dû en totalité alors qu’elles réalisent déjà d’énormes profits sur le dos des artistes. Et vous savez quoi ? Ca me fait un peu penser au type qui exige de toucher une partie de la cagnotte du loto, alors qu’il ne joue pas !

Mais le pire dans tout ça, c’est cette connivence que je devine. Une connivence entre le pouvoir politique et quelques lobbys pour faire coïncider leurs intérêts… Le second permettant au premier de renforcer une surveillance de l’individu au nom d’une cause prétendument salvatrice.
D’ailleurs, et j’en terminerais ici, pour s’en convaincre il suffit de voir qui représente le mieux la lutte anti-piratage… Monsieur Olivennes, rapporteur du projet de loi n’est-il pas l’ancien directeur de la FNAC ? Monsieur Luc Besson, réalisateur au parcours chaotique reconverti dans la production d’œuvres cinématographiques de série Z, n’est-il pas le premier à s’élever contre cette pratique ? (Voir sa tribune dans Le Monde.fr).

Ce sont là des questions plus que légitimes. N’est-il pas ?