Je voulais vous dire…


Un blog qui parle de politique, de social, d'environnement... De la vie quoi!


mercredi 17 juin 2009

Accident de parcours

Après tout, il n’y a pas de raison que je ne vous parle pas de ça… Il n’y a pas que la politique dans la vie, et si jamais vous l’oubliez, la vie justement se charge de vous le rappeler.

Tout a commencé ce mardi. Un toc-toc timide à la porte de la maison, et voilà la voisine qui m’annonce qu’elle a vu ma Gaëlle ce matin et que celle-ci n’allait pas très bien… Elle a essayé de mettre la main dessus, mais la fieffée catin s’est échappée pour se planquer et depuis elle la cherche.
Elle commence à pleurer parce qu’elle aime bien ma chatte la voisine… Moi, calme et raisonnable, je la rassure comme je peux… Gaëlle est une chatte indépendante, elle vit sa vie et jusqu’à présent cela lui a plutôt réussit… C’est qu’elle a 19 ans la bougresse.

Ce n’est pas la première, ni la dernière fois que cette chatte passe un mauvais moment, et jusqu’à présent, ça c’est toujours bien terminé… Mais elle arrive quand même à me culpabiliser cette pauvre dame. Face à ses larmes, j’ai l’air d’un monstre d’indifférence avec ma froideur. Plus pour rassurer la vielle que pour autre chose, je m’habille et je vais jeter un œil dans le quartier. Peine perdue. Va retrouver une bête qui considère la troisième dimension comme une chose acquise !
J’ai donc laissé tomber.
C’est vers les quatre heure de l’aprèm’ que l’on retoque à la lourde… Les yeux pleins de sommeil j’ouvre et je retrouve la voisine, accompagnée de son fils qui me tend une boite en carton dans laquelle se trouvait Gaëlle… Là, j’ai pris une grande claque dans la gueule.

Ma Gaëlle était là, prostrée. Elle avait l’air groggy et elle râlait… Sans la sortir de sa boite, je promène mes mains sur son corps comme si je savais ce que je faisais. La queue, le bassin, les côtes, les épaules, tout avait l’air d’être à sa place. Elle gardait la tête baissée et c’est pourquoi je vis en dernier ce qui n’allait pas… En relevant sa tête, je découvris son minois d’ordinaire si joli, complètement ravagé. Sa mâchoire inférieure ne ressemblait plus à rien. Ses yeux mi-clos et son nez disparaissaient sous des amas purulents de mucus sanguinolent.
Je remerciais la voisine qui pleurait de plus belle, et 10 minutes plus tard j’étais dans le bus direction la clinique vétérinaire.

Dans le bus je gambergeais comme un fou. J’imaginais le pire : Cancer foudroyant, tumeur explosive… (Elle a dix-neuf ans quand-même). Et puis ça allait certainement me couter un bras… Comment faire pour la soigner alors que je n’ai même pas de quoi faire deux repas par jour ?
J’arrivais donc à la clinique passablement sur les nerfs.
La réceptionniste fit les frais de mon énervement. Agacé par ses questions à la con, je lui répondais assez sèchement avant de me rendre compte qu’elle n’y était pour rien et de m’excuser. Elle a compris et n’a rien dit…
Puis le véto est arrivé et au bout de quelques secondes le verdict est tombé : Accident avec une voiture, traumatisme de la face.
Moi qui avais imaginé des saloperies de maladies longues et douloureuses, je me sentis comme soulagé…
Je balbutiais « Dieu Merci ! Alors vous pouvez faire quelque-chose pour elle ? »
Il me répondit qu’il fallait attendre les radios. Il prit la boite en carton et disparu par une porte.

Je me retrouvais donc seul avec la réceptionniste. Je remarquais qu’elle était toute jeunette et très jolie… Sans doute une de ces stagiaires à peine nubile que l’on exploite pendant une semaine ou deux, histoire de leur montrer ce qu’est le monde du travail… J’eu honte pendant un instant de l’avoir regardé comme une femme, et pour dissimuler mon trouble, aussi stupide qu’incongru, je me mis à lui parler de Gaëlle…
Je lui racontais quel animal merveilleux c’était. Que nous vivions ensemble depuis bientôt vingt années… Je lui parlais de ses habitudes, de ses lubies de vielles fille… Combien elle pouvait être chiante… Et c’est là que j’ai craqué.
Je me suis mis à chialer comme une madeleine. Tout à coup, le sang-froid dont j’avais fait preuve jusqu’alors s’est effondré et toute la place que cette fichue bête tenait dans ma vie s’est révélée.
J’avais beau essayer de me contrôler, ça ne s’arrêtait pas. Je ne sais pas qui était le plus gêné, la gamine ou moi.

Lorsque le véto est revenu avec la radio, je me suis un peu calmé. Les radios ça me connait, j’ai l’habitude. C’est quelque chose de concret sur lequel on peut s’appuyer et quelque-part, ça me rassure.
Il m’expliqua qu’il avait décelé une fracture complexe de la mandibule inférieure, ainsi qu’une autre plutôt moche du palais. A part un problème de déshydratation, tout le reste avait l’air ok. Pas de fracture du crâne, pas de traumatismes…
Il me dit aussi qu’il fallait l’opérer. Tout de suite.

Je lui ai alors demandé quel genre de vie elle allait avoir après ça… Pour lui, si elle survivait à l’intervention, il n’y avait pas de raison pour qu’elle ne vive pas. Il était prudent cependant. Désespérément prudent.

Je lui ai alors dit que je n’avais pas d’argent. Il m’a répondu que ce n’étais pas le plus important… Il m’a donné deux ou trois adresses d’associations qui prenaient en charge ce genre de cas. A moi de plaider ma cause. L’opération coutait 150 €.

Et c’est ce que j’ai fait. Alors que la pauvre chérie se faisait opérer, je me suis rendu chez l’une de ces assos. Là, je suis tombé sur une charmante dame constamment occupée à placer des chats par téléphone… Entre deux coups de fil, je commençais à lui raconter mon histoire, mais je vis bien vite que l’âge de ma Gaëlle la rendait sceptique.
Mais j’ai persévéré. Je ne lui ai pas dis combien cette chatte comptait pour moi, j’ai oublié. Je lui ai simplement parlé de la vie qu’on menait tous les deux… Au bout de quelques minutes elle m’a signé un bon d’une valeur de 100 €.
Lorsque je l’ai remercié, je sanglotais de nouveau (Putain !).

J’ai téléphoné en rentrant à la maison. L’opération s’était bien passée, mais il fallait attendre. Le lendemain j’ai encore téléphoné et on m’a dit que ça allait… Elle avait survécu !

Alors, en fin d’après-midi je suis allé la récupérer. Pendant la journée il m’était venu une idée que j’ai soumise au véto ; Je m’étais demandé si dans ma peur panique de perdre ma chatte, je n’avais pas oublié un peu de penser à elle… Quelle vie allait-elle avoir ? Avais-je fais le bon choix ? N’avais pas été égoïste ?
Il m’a rassuré sur ce point. S’il l’avait opéré, c’est qu’il pensait vraiment qu’elle aurait une vie à peu près normale.
Mais il m’a quand même précisé que les prochains jours seraient durs pour elle… Elle allait souffrir, et ne pourrait pas s’alimenter avant quelques jours. Je dois la ramener demain matin pour qu’il la perfuse (15 €), mais après ça il faudra que je joue de la seringue et que je l’alimente avec de la pâtée mixée et liquide…
Mais c’est pas grave, je m’en tape. Elle va vivre et c’est tout ce qui compte. Je vais encore avoir cette fichue chatte dans les pattes pendant de longues, de très longues années…

Pendant que je tape ces mots, Gaëlle est dans un panier. Elle se repose. De temps en temps je la vois qui change de position, mais dans l’ensemble ça à l’air d’aller. Elle ne passe plus son temps à ouvrir et fermer sa gueule, c’est déjà ça. Mais ça va aller. Je sais que maintenant ça va aller…

Voilà. Je ne sais pas pourquoi, mais il fallait que je vous raconte cette histoire. J’en avais besoin. Ca m’a permis de me rendre compte de certaines choses sur moi, la vie que je mène, les choses importantes… Alors, je m’en excuse si jamais cela vous a paru long et pesant, mais que voulez-vous, comme je l’ai dit au début : Il n’y a pas que la politique dans la vie, et si jamais vous l’oubliez, la vie justement se charge de vous le rappeler… De façon longue et pesante.