Je voulais vous dire…


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jeudi 18 décembre 2008

Amendements et démocratie

Bonjour à tous ! Ça va bien ? Moi, ça va mieux, je vous remercie…
M’enfin, ça va mieux… Quand je dis ça va mieux, je parle de ma petite santé. Parce que sinon, pour ce qui est de mon beau pays que j’aime, le moins que l’on puisse dire c’est que ça va de mal en pis. Et quand je dis pis, je ne parle pas des mamelles de la France ! D’ailleurs, celles-ci ne sont plus, comme on nous l’a appris à l’école, labourage et pâturage, mais plutôt enfumage et rétropédalage.
Mais bon, là je m’égare…

En ce froid matin de décembre, j’avais envie de revenir sur la réforme de l’audiovisuel public. Non pas sur le fond, mais pour une fois sur la forme.

Je ne sais pas si vous l’aurez remarqué, mais cette dernière semaine avant les fêtes de Noël et la fameuse trêve des confiseurs, nous venons d’assister à une étrange manœuvre de la part de notre gouvernement et de sa majorité. Une manœuvre que l’on pourrait qualifier de rusée et légitime si l’on est un umpiste patenté, et de quelque peu perverse et contraire à la démocratie si l’on est un gauchiste invétéré comme moi.

En vous la faisant courte, voici donc les faits. Mardi, la ministre de la Culture demande au patron de France télévision de prendre lui-même la décision de la suppression de la pub sur ses chaines (Demande, demande… moi je dirais plutôt ordonne !). Celui-ci, un peu coincé s’il veut garder son poste encore un peu, s’exécute. Le prétexte invoqué pour justifier d’une telle démarche est le suivant : Vu la lenteur des débats à l’assemblée nationale, le vote risque de ne pas avoir lieu dans les temps pour entériner la réforme avant le 5 janvier. Date à laquelle s’est préparée la chaine depuis un an pour installer sa nouvelle grille. Au passage, la décision devient industrielle et non-plus politique. Vous gouterez la subtile différence…
Le lendemain, mercredi 17, l’assemblée fini ses travaux et vote le texte avec une majorité toute relative, 293 voix contre 242….
Il n’y a pas un truc qui vous choque ? Parce que pour moi c’est clair, le gouvernement n’était pas vraiment sûr de sa majorité et a préféré assurer le coup, au cas où les choses se passeraient mal.

Bon, je ne sais pas ce que vous en pensez, d’ailleurs vous me le direz, mais moi je trouve le procédé quelque peu roublard. Parce que si par un heureux hasard l’assemblée n’avait pas voté le projet de loi, étant donné que le CA de France Télévision avait déjà voté la suppression de la pub, la réforme était, de fait, actée. Donc, le joli gros cadeau que Sarkozy voulait faire à ses copains des chaines privées était de toute façon déjà livré avec la hotte du père Noël…
Ca, c’est du forçage de mimines ou je ne m’y connais pas.

Si vous écoutez les caciques de l’UMP, Jean-François Copé en tête et Lefebvre juste derrière en train de lui sucer la roue (à défaut d'autre chose ?), vous entendrez que tout ça c’est la faute à l’obstruction acharnée de l’opposition.
Mouais… Obstruction ou simple travail parlementaire ? Parce qu’il faut savoir ce qu’il veut le Sarko quand il dit vouloir plus de pouvoirs pour le parlement !

Penchons nous un instant, si vous le voulez bien, sur ce qui est pour moi un aspect vachement important de la démocratie à la française.
Lorsque l’on est assez con pour élire, ou pas, un président au suffrage universel, ça ne veut pas forcément dire qu’il va pouvoir faire tout ce qu’il veut pendant cinq ans ! Ben non ! Parce que même si celui-ci dispose d’une confortable majorité à l’assemblée et au sénat, le dispositif parlementaire est là pour, comment dire, encadrer les actions du gouvernement. Et la seule façon qu’il reste à l’opposition pour tenter de contrer les actions du gouvernement au sein de ce dispositif parlementaire, c’est de déposer des amendements.
Sinon, il y a aussi la rue comme façon de contrer le gouvernement, mais on en a déjà parlé dans l’article précédent…

Je ne vais pas vous faire un court de droit constitutionnel sur les amendements je vous rassure. Tout d’abord parce que c’est bien chiant, et ensuite j’ai pas toute la matinée car mon frigo est vide et je dois aller faire quelques courses.
Je vous dirais seulement qu’il y a deux buts à un amendement.
Le premier c’est celui d’amender au sens ancien du mot, c'est-à-dire : améliorer. Il s’agit de contester un point particulier du projet de loi, de façon à le modifier ou à le supprimer.
Le deuxième but est de pousser la majorité à la faute en espérant que celle-ci fera l’erreur de ne pas être en nombre suffisant pour le vote de chaque amendement. Rappelez-vous ce fameux mois de mai 2008, lorsque la loi sur les OGM a faillit capoter ! (Voir archives de la Télélibre.fr). C’est à ça que servent les amendements !
Donc, pour multiplier les possibilités de fautes, l’opposition multiplie les amendements. Et ça peut même devenir carrément une vraie bataille interminable de procédure lorsque l’on arrive, comme sur l’audiovisuel public, à une somme de 850 amendements… Et encore ! 850 c’est de la roupie de sansonnet au regard des 4000 qui ont été déposé contre la loi sur le travail le dimanche !

Je ne sais pas si vous avez eu un jour la curiosité de regarder à la télé les discussions des députés lors de l’examen de ces amendements… Bon, je vous l’accorde, ça a un côté bien chiant comme ça au prime abord. Mais ça vaut le coup d’œil, au moins une fois, ne serait-ce que pour constater de visu comment fonctionnent nos institutions. Les raisons de chaque amendement sont défendues, puis contestées puis enfin vient le vote. Et tout ça peut prendre facilement trente minutes sinon plus. Au final, on perd du temps et on retarde d’autant l’adoption de la loi.
C’est une lutte âpre et acharnée, qui ressemble à une guerre de tranchée… C’est de la baston en direct, mais au moins cela a le mérite de mettre tous les points d’un texte sur la place publique. C’est l’agora de nos ancêtres, le lieu des révélations où chacun peut prendre connaissance de son devenir… C’est l’arène où a lieu un travail parlementaire essentiel, qui fait la différence entre une démocratie et une dictature présidentielle, fut elle glorieusement élue.

Alors je sais ! Si quelques égarés de droite viennent me visiter, ils auraient beau jeu de me rétorquer que c’est la gauche qui, par le passé, usait et abusait de l’article 49.3, dit du vote de confiance, qui permet l’adoption sans débat d’un texte, pour forcer la main à la droite lors des périodes de cohabitation. Et ils auraient raisons ces visiteurs.
Pour moi, ces pratiques sont un déni de démocratie. Point barre.

Maintenant que tout est fini, que le gouvernement a réussit à mettre à genoux la télé publique, le travail de ces parlementaires d’opposition, cette « obstruction » tant décriée, aura au moins eut le mérite de nous avertir des dangers qui nous guettent. Nous seront on ne peut plus vigilants quant aux dérives éventuelles que cette réforme suscitera.

La prochaine partie de ce jeu passionnant a dors et déjà commencée… Pensez-donc ! Il leur a fallut trois semaines pour examiner 850 amendements ; Imaginez un peu le temps que ça va leur prendre d’en examiner 4000 !

Je sens qu’on n’a pas fini de rigoler !